Les féminicides conjugaux se multiplient : l’Alliance MH2 demande que le gouvernement implante urgemment des mesures pour prévenir les féminicides
19 mars 2021
Montréal, le 19 mars 2021 – Après 5 féminicides conjugaux en moins d’un mois en février qui a fait 8 orphelins, la situation ne semble pas se résorber. En l’espace de quelques jours, un féminicide a été évité de justesse à Joliette et on apprend aujourd’hui la mort par arme blanche de deux personnes qui semblent pointer vers la direction d’un homicide-suicide en contexte conjugal à St-Léonard enlevant la vie à Nadège Jolicoeur, 40 ans, faisant par le fait même 5 orphelins. Face à la gravité de la situation, l’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) interpellent le gouvernement pour la mise en place urgente de mesures concrètent visant à prévenir l’homicide conjugal.
Une situation que l’on voit venir depuis des mois :
Toutes les organisations en violence conjugale ont le même constat depuis des mois; la pandémie crée une situation explosive en matière de violence conjugale. À l’automne dernier, une étude menée par Hébergement Femmes Canada soulignait que plus d’une maison d’hébergement sur deux (52%) constate une augmentation de la gravité de la violence subie par les femmes qu’elles desservent depuis le début de la pandémie. « Plus on avance dans la COVID, plus ces homicides vont se répéter. On le sait, dans une dynamique de violence conjugale, la séparation est le moment où le risque homicidaire est le plus élevé. En déconfinant, Madame a plus d’opportunités de sortir, donc plus d’opportunités d’aller chercher de l’aide et de mettre fin à la relation. Monsieur n’acceptant pas la séparation et, surtout, n’acceptant pas la perte de contrôle sur Madame, procède au niveau le plus élevé de prise de contrôle sur le corps de Madame, celui de lui enlever la vie. » souligne Maud Pontel, coordonnatrice de l’Alliance MH2 et membre du comité d’examen des décès liés à la violence conjugale du Bureau du coroner.
Des solutions urgentes à implanter par le gouvernement :
À moins d’une semaine du dépôt du budget, l’Alliance MH2 interpelle le gouvernement pour la mise en place urgente de mesures visant à prévenir les féminicides et lutter contre la violence conjugale. À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars dernier, l’Alliance MH2 publiait 8 recommandations qu’elle réitère aujourd’hui. « Il est impératif que l’ensemble de ces enjeux soient adressés dans le prochain budget qui sera déposé le 25 mars. Le gouvernement a l’occasion de mettre sur pied des éléments qui pourraient sauver la vie de femmes et d’enfants, il ne doit pas passer à côté. » souligne Maud Pontel.
Les 8 mesures sont :
- Assurer le développement de nouvelles unités en maison d’hébergement pour femmes et enfants victimes de violence conjugale, notamment 106 unités en maison de 2e étape. Il est aussi primordial que le gouvernement s’assure que chaque région administrative bénéficie de services en 2e étape, ce qui n’est pas le cas actuellement.
- Assurer une plus grande cohérence dans le système judiciaire, notamment par la présence systématique de procureurs dédiés à la violence conjugale dans chaque région du Québec et l’instauration d’un Tribunal unifié de la famille.
- Mettre sur pied l’implantation d’un Secrétariat à la coordination et à l’intégration des actions en matière de violences sexuelles et conjugales qui ait réellement la capacité et l’autorité de coordonner l’action de chacun des Ministères responsables dans leur champs de compétence.
- Consolider les cellules d’intervention rapide servant à assurer un suivi des personnes ayant des comportements violents à risque d’homicide dans les régions où elles existent déjà. Assurer l’implantation de ces cellules dans l’ensemble des régions administratives du Québec.
- Garantir l’implication des organismes travaillant avec les hommes violents dans une perspective de responsabilisation de l’agresseur afin de véritablement développer un filet de sécurité auprès de la victime et de ses enfants.
- Accroître dès 2021 le financement des services d’échanges de garde supervisés de 5,3 M$ pour répondre aux besoins immédiats.
- Garantir le développement des logements sociaux à son sens large afin d’assurer une stabilité résidentielle pour les femmes victimes de violence conjugale et éviter les goulots d’étranglement dans l’accès aux services en maison d’hébergement.
- Refuser de reculer sur les quelques gains acquis en s’assurant que la réforme de l’IVAC ne vienne pas nuire encore davantage aux femmes victimes de violence conjugale en complexifiant un processus déjà laborieux. Il est primordial que Simon Jolin-Barette soit à l’écoute des revendications des groupes de défense des droits des victimes qui sonnent l’alarme depuis des mois sans grande écoute.
Rappel aux médias
L’Alliance MH2 profite de l’occasion pour faire un rappel aux médias à la vigilance en matière du vocabulaire employé par les journalistes pour rapporter les événements. Depuis le début de l’année, des féminicides se multiplient et 13 enfants sont dorénavant orphelins, il est essentiel que les mots utilisés soient représentatifs de la gravité de la situation. Il n’est pas le temps d’utiliser des formulations atténuantes comme « drame conjugale », « drame familial » ou « crime passionnel ». Il s’agit d’homicides conjugaux, plus précisément de féminicides; ce type de meurtre d’une femme où sous-tendent des enjeux majeurs d’inégalités de genres, où monsieur n’a pas « perdu les pédales » ou eu un « excès de colère » mais a pris le choix délibérer de commettre la forme la plus sévère de prise de contrôle sur le corps de sa conjointe, celui de lui enlever la vie. L’heure est grave, le ton journalistique doit en faire part.
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À propos de l’Alliance :
L’Alliance des maisons de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) regroupe et représente les maisons d’hébergement de 2e étape qui offrent aux femmes, avec ou sans enfants, des services spécialisés en violence conjugale post séparation par l’entremise de logements transitoires sécuritaires. En 2019, les 24 membres de l’Alliance ont hébergé 512 personnes (223 femmes et 289 enfants) en danger de violence conjugale postséparation dans un parc total de 119 logements et 21 chambres
Source :
Vicky Croisetière, agente de communication, communication@alliancemh2.org | 438-356-2100